Photo par Jacques Boisset |
vendredi 27 janvier 2012
vendredi 13 janvier 2012
Ah! Comme la neige [1]…
Neige mouillée qui se balance
Sensuellement dans sa chute,
Petits flocons secs
Qui volètent d’allégresse.
[1]
Allusion au plus célèbre poème du plus célèbre poète québécois, Nelligan.
[2] Vers
emprunté au précédent.
vendredi 6 janvier 2012
un oiseau qui vole à votre place...
De Milena Jesenská in « Mystérieuses
rédemptions » (Vivre, traduction Claudia Ancelot, 1985)
« Dîtes-moi, cela ne vous est-il jamais arrivé ? Vous êtes couché
dans la nuit, vous regardez le plafond dans le noir, paralysée de terreur et de
douleur et soudain, quelque part à l’étage, un enfant pleure et pleure à
votre place ? Ne vous est-il jamais arrivé qu’au théâtre des hommes
meurent, se battent et chantent à votre place ? Ne vous est-il jamais arrivé de
voir à l’horizon un oiseau qui vole à votre place, les ailes déployées,
tranquille, heureux, disparaissant au loin pour ne jamais revenir ?
N’avez-vous jamais trouvé une route dont les pavés sont capables de supporter
précisément autant de pas qu’il vous en faut pour vous libérer de la douleur ?
Je crois fermement que le monde vient à notre secours. On ne sait ni
quand, ni comment, ni par quoi. Il survient inopinément, simplement, avec
compassion. »
Commentaire de mon amie Hélène :
Celui là
est très beau mais un peu désespérant quand on sait comment « le monde est
venu à son secours », puisqu’elle est morte à Ravensbrück.
Mais en fait, le passage continue comme suit :
« Parfois être sauvé est presque aussi douloureux que la douleur
elle-même. Je connais un homme [Kafka] qui a les poumons malades. Il est grand, maigre, son
visage est aigu, anguleux, méchant et incroyablement bon. Voici de qu’il m’a
dit de sa maladie : « Lorsque le cœur et le cerveau en ont eu assez
de supporter la souffrance, ils se sont mise en quête de quelque chose qui
puisse les sauver – et c’es alors que les poumons se sont proposés. Je sais que
ma maladie m’a sauvé. Mais cette transaction entre le cœur et les poumons, qui
s’est faite à mon insu, a dû être terrible. « On dirait un conte de fées. Un
conte de fées étrange venu d’un autre monde, et pourtant, c’est la vérité de l’existence
et de la souffrance. Ici, les poumons malades ont fait office de rédempteurs.
Non, ne vous étonnez pas. Il ne faut pas s’étonner. Peut-être faut-il en
pleurer. Il faut serrer sa tête dans ses mains et aimer la vie avec ardeur, avec
tant d’ardeur que tout cet amour finira par l’attendrir et par racheter sa
malédiction. »
Il y a par ailleurs tout un article consacré à Kafka (p. 133 sq.) où Milena
reprend sensiblement la même idée après sa mort en citant les mots de Kafka dans
une lettre : « [P]endant des années, il a souffert d’une maladie des
poumons et, bien qu’il la soignât, il l’alimentait aussi sciemment et l’entretenait
dans ses pensées. "Lorsque l’âme et le cœur ne supportent plus le fardeau,
alors les poumons en assument la moitié pour qu’au moins la charge soit à peu près
également répartie". »
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