samedi 21 juillet 2012

Fleurs de poireau


Acheté des fleurs de poireau
Ne viennent pas de l’Ohio
Encore moins du Colorado  
Poussées sur la terre d’ici
(C’est du moins ce qu’on m’a dit)
Ah qu’elles sont jolies!

Post scriptum
Je sais bien qu’ici aussi
La foudre peut tomber
L’esprit se déchainer
Et que l’hiver va arriver (c’est sûr)
Mais en attendant…
J’ai acheté des fleurs de poireau. 

vendredi 20 juillet 2012

Fifi, philosophe...


Hier au soir, je ne sais pourquoi – si, je sais, j’y reviendrai! – cette évidence m’a sauté au visage : il ne peut y avoir de régression infinie de la pensée pour la bonne raison que nous sommes finis. Certes le nombre de nos neurones est quasi-infini est la quantité de connexions qu’ils peuvent établir l’est encore plus (si l’on peut dire), mais à l’arrivée, nous n’en avons qu’un certain nombre – c’est-à-dire un nombre fini. Et en eussions-nous encore plus, que cela ne changerait pas grand-chose, parce que le temps qui nous est imparti est bel et bien fini et que, sauf à philosopher au chaud dans son poêle (ou dans sa chambre) comme Descartes à l’infini, il y a pour l’être humain des choses pas mal plus urgentes à faire que de régresser − fût-ce métaphysiquement.

En fait – j’y reviens – je me suis à penser à ça au bout de quelques heures (jours) d’introspection sur le mode « − pourquoi j’ai fait ça? – tu croyais bien faire –mais encore? – aider – qui? Elle ou toi? − mmhh, chuis pas sûre… j’ai plutôt l’impression que… etc. », le genre de processus infini où tout sentiment, toute pensée, appelle en retour un doute que je n’oserai qualifier de métaphysique mais qui s’avère à coup sûr abyssal. (Et bien sûr, j’étais moi aussi dans une sorte de poêle, la canicule montréalaise y pourvoyant.)

On me dira que ce genre de pensée désordonnée, n’est pas la régression. La régression a un pas plus militaire et plus hiérarchique : je pense que – Non, je pense que je pense que, etc., ad libitum. De toute façon, ça ne change guère le problème : que l’on conçoive la conscience comme une armée en ordre de marche ou comme une assemblée révolutionnaire traversée de mortelles divisions, le résultat est le même : ça ne s’arrête pas. Or bien, il faut manger – ou payer les factures, téléphoner au dentiste, torcher le moutard, que sais-je? Il faut que ça s’arrête. Et même au niveau de la pensée pure, Descartes lui-même ne peut douter qu’il doute au point de ne pas écrire ses Méditations. Il arrive un moment où il nous faut adhérer à une croyance, quelle qu’elle soit, ou tout simplement arrêter de penser – au moins quelques minutes. 

mercredi 4 juillet 2012

Des règles


On m’a souvent dit que je faisais toujours le contraire de ce qui était demandé, que j’enfreignais les règles comme à plaisir. C’est vrai que j’ai tendance à mettre les pieds dans le plat (quel que soit le plat) et à enfreindre les règles mais – MAIS – ce n’est pas par plaisir, c’est parce que je ne les comprends pas. On me dira – on m’a dit – qu’il n’est pas nécessaire de comprendre une règle. Le problème, c’est que je ne retiens que ce que je comprends. Si quelqu’un me dit que le soir, il faut 1) se brosser les dents et 2) prendre sa douche, je comprends qu’il faut se brosser les dents et prendre sa douche (dans n’importe quel ordre). Évidemment, je prends des risques et je peux faire des erreurs. Si dans une recette, on doit d’abord faire revenir le légume A et seulement ensuite ajouter B, il se peut que ça ne fasse aucune différence de mettre A et B en même temps, mais il se peut aussi que ça en fasse une. Ou encore, que ça en fasse une pour les gourmets mais pas pour moi (ni pour mon fils, mon mari ou mes invités). Bref, ne pas observer les règles à la lettre peut être dangereux.

Sauf que les observer l’est aussi. Et en observer de mauvaises – ou d’approximatives – encore plus. Comment rester un écrivain minimalement lisible si on obéit à des règles écrites par des illettrés ou tout simplement des gens qui refusent de se fatiguer à lire? Comment se garder un peu d’espace pour penser – ou pire, créer – si on a la tête farcie de règles? Et d’ailleurs les règles, dans les états dits évolués, pas besoin de courir après, elles sont là : du code de la route avec ses infinis raffinements – virage à gauche au feu rouge autorisé ou non, règles d’engagement dans les carrefours giratoires, etc. – au mode d’emploi des appareils électroniques – souvent si difficiles à comprendre qu’on se demande (?) si le but n’est pas de vous obliger à consulter un spécialiste − moyennant finances évidemment! – en passant par celles qui régissent les impôts, la retraite, les remboursements de frais dentaires, les frais de copropriété, la facturation du téléphone (Bell, je te hais, mais Vidéotron aussi!), et j’en oublie, heureusement! Les règles nous pourrissent la vie, pas besoin d’en rajouter…

Alors oui, c’est vrai, j’avoue, je n’écoute pas toujours aussi attentivement que je le devrais, je ne respecte pas toutes les règles (en fait j’en respecte le moins possible – et il en reste encore pas mal) mais il m’arrive parfois d’avoir le temps de jeter un coup d’œil à mon arbre, celui qui pousse devant ma fenêtre et est devenu mon alter ego (salut, Brassens!), de lire un livre et même… d’ouvrir le Grevisse pour y trouver un commentaire intelligent – et généralement nuancé – sur une règle grammaticale.